DE QUELLE POSTURE PARLE-T-ON ?
Au cours de l’histoire millénaire du yoga, Ardha Chandrasana a désigné plusieurs asanas différentes.
Celle à laquelle nous allons nous intéresser ici est celle que BKS Iyengar a référencée sous cette appellation dans les années 1960s : une posture debout avancée qui sollicite l’équilibre et requiert l’ouverture des hanches.
LA POSTURE SELON BKS IYENGAR VS LA POSTURE CONTEMPORAINE
Aujourd’hui, la posture est le plus souvent enseignée dans la géométrie suivante : la jambe de terre et les bras, tous trois à la verticale, forment un T avec le tronc et la jambe levée. En outre, seuls les bouts des doigts de la main inférieure sont posés au sol. Enfin, le pied en suspension est flex.
Mais le père du Yoga Iyengar l’enseignait avec d’autres indications anatomiques : la paume de la main d’appui pleinement au sol, le bras supérieur le long du buste et le pied en l’air pointé vers l’arrière.
On distingue mieux, dans cette version, la forme de demi-lune qui a donné son nom à la posture (ardha signifie « moitié », chandra « lune » et asana « posture »).
On comprend pourquoi l’ère moderne lui a préféré des modifications.
Garder le bras le long du buste incite naturellement à abaisser la jambe levée et à arrondir le dos, tandis que tendre le bras et pointer la main vers le ciel invite à ouvrir le cœur et à maintenir les jambes à l’équerre.
Par ailleurs, déposer la main à plat dans le sol impose un étirement plus intense au niveau de la hanche opposée et des ischios-jambiers de la jambe de terre que s’y l’on effleure le sol du bout des doigts.
Enfin, passer du pied flex au pied pointé défie un peu plus l’équilibre.
COMMENT PRENDRE LA POSTURE ?
Dans Ardha Chandrasana, veillez aux ajustements suivants :
- Les orteils du pied au sol sont orientés vers la tête.
- Utilisez toute la surface de la plante de pied pour prendre appui dans la terre et étirer le mollet.
- Montez la rotule, activez les quadriceps (les ischio-jambiers s’allongent) et engagez le fessier.
- Levez le bassin et le tronc, et maintenez-les à l’horizontal.
- Ouvrez la hanche supérieure. Contractez les abducteurs de la hanche et les ischios-jambiers de la jambe levée.
- Tendez le genou de la jambe levée et engagez les muscles de l’extérieur du mollet.
- Étirez le psoas et les muscles (érecteurs du rachis et obliques) du flanc supérieur.
- Élargissez la poitrine : sentez les pectoraux s’étirer et les scapulas s’écarter de la colonne.
- Faites une rotation externe des deux bras. Contractez les triceps pour tendre les coudes et éloignez les mains du buste.
- Portez le regard sur la main levée.
- Ne mettez pas de poids dans la main au sol. Elle marque simplement un point d’équilibre.
A noter que le travail est particulièrement intense pour la jambe d’appui.
Aussi, en vue d’harmoniser l’organisme et de faire profiter des bienfaits du travail au corps entier, veillez à prendre la posture des deux côtés.
Précisément, les vertus de la demi-lune sont nombreuses.
LES BIENFAITS
- Elle renforce les chevilles.
- Elle fortifie les jambes et corrige les éventuelles déformations.
- Elle tonifie les lombaires.
- Elle facilite la digestion.
- Elle soulage les douleurs gastriques et menstruelles.
- Elle prévient les maux de dos.
Qui plus est, en bouleversant les repères habituels et en offrant une perspective nouvelle, Ardha Chandrasana améliore la proprioception et la capacité de concentration.
Elle apporte enfin un sentiment de légèreté et calme l’anxiété.
LES CONTRE-INDICATIONS
La posture est à éviter si vous souffrez d’ostéoporose, de tension artérielle basse ou êtes sujets aux migraines ou aux insomnies.
Aux femmes enceintes, il sera conseillé d’utiliser le support d’un bloc sous la main de terre (voir plus bas), afin de garder la colonne droite et de ne pas contraindre le bassin.
VARIATIONS POUR DÉBUTANTS
D’ailleurs, si, pour quelque raison que ce soit, cette posture s’avère délicate ou inconfortable, voici des adaptations qui peuvent vous être proposées.
Plier les genoux
S’il vous est difficile de trouver l’équilibre, fléchissez le genou de la jambe au sol et descendez légèrement la jambe levée. Cela abaissera votre centre de gravité et vous aidera à gagner en stabilité dans la tenue de la posture.
Abaisser le regard
Si la nuque ou les cervicales sont fragiles, ou si vous perdez l’équilibre à regarder vers le ciel, gardez la tête dans l’axe de la colonne et regardez devant vous. Vous pouvez même si nécessaire incliner la tête vers le bas et regarder vers la main au sol.
Utiliser un bloc
Placez entre le sol et la main d’appui un bloc rectangulaire, que vous pouvez disposer dans le sens de la hauteur pour commencer puis dans la largeur ensuite. L’étirement de la hanche et du flanc sera moins intense.
PRENDRE APPUI SUR un mur
Un mur peut vous aider à trouver de la stabilité.
- Vous pouvez y placer le pied arrière, pour éviter de basculer.
Affinez l’alignement du corps et mémorisez intérieurement les sensations liées pour pouvoir répéter l’exercice sans le mur.
Profitez de ce soutien pour travailler l’allongement du corps : poussez la plante de pied contre le mur, étirez la jambe levée et la colonne vertébrale, allongez la nuque et dirigez le sommet du crâne vers l’avant.
- Vous pouvez sinon choisir de déposer l’arrière du corps contre le mur.
Maintenez au contact du mur tous les membres situés sur la ligne verticale entre les deux mains (dos des mains, extérieur des bras, omoplates) et le flanc externe de la jambe d’appui, ainsi que les parties du corps situées sur la ligne horizontale (arrière de la tête, dos, fessiers, arrière de la jambe levée et talon). Profitez-en pour coller l’omoplate supérieure au mur afin de bien ouvrir la poitrine et pour lever le regard vers la main levée.
N’oubliez pas, comme pour toutes les asanas, que le mur constitue un excellent outil pédagogique, qui aide à sentir la posture dans sa forme complète et à se libérer de la peur générée par la recherche d’équilibre, mais que plus tôt on s’en défait mieux c’est !
VARIANTES AVANCÉES
Ardha Chandrasana les deux mains en l’air
Décollez la main inférieure du sol. Le bras reste actif et les bouts des doigts pointés en direction de la terre.
Une autre option peut consister à plier le bras pour déposer la main inférieure sur la poitrine.
Ces deux variations challengent l’équilibre puisqu’on perd un point d’appui. Qui plus est, le flanc inférieur se voit davantage sollicité.
Ardha Chandra Chapasana
Dans la posture de la canne à sucre, la jambe en l’air se plie et la main levée vient saisir la cheville. La pression du dessus du pied contre la paume de main aide le genou à se lever et la hanche à s’ouvrir. Le psoas et quadriceps de la jambe levée s’étirent. La poitrine doit se déployer davantage et les muscles du dos s’engager pour permettre le backbend (extension de la colonne).
L’équilibre est encore mis à l’épreuve.
Parivrtta Ardha Chandrasana
La posture de la demi-lune incorpore ici un twist qui vient masser les organes internes. C’est le bras opposé à la jambe de terre qui vient au contact du sol, et la main opposée à la jambe levée qui s’érige vers le ciel. Le buste entre en torsion, de la taille jusqu’aux épaules.
SE PRÉPARER À ARDHA CHANDRASANA ET À SES VARIANTES AVANCÉES
PRÉPARATION À ARDHA CHANDRASANA
Pour préparer Ardha Chandrasana, il faut travailler l’équilibre debout et l’ouverture des hanches.
Exercez-vous donc en Virabhadrasana III (posture du guerrier III) pour ancrer l’équilibre sur une jambe, muscler les quadriceps et tonifier le buste.
Travaillez ensuite Virabhadrasana II (posture du guerrier II) et Trikonasana (posture du triangle) pour ouvrir les hanches et créer de l’espace au niveau de la poitrine et des épaules.
PRÉPARATION À parivrtta ardha chandrasana
Si vous visez Parivrtta Ardha Chandrasana (posture de la demi-lune en torsion), essayez d’abord Parivrtta Trikonasana (posture du triangle en torsion) afin de vous habituer au twist sans mettre en jeu l’équilibre.
PRÉPARATION À ardha chandra chapasana
Pour accéder à Ardha Chandra Chapasana, passez par Urdhva Prasarita Eka Padasana (standing split) pour renforcer les chevilles et étirer les ischio-jambiers et par Natarajasana (posture du danseur) pour travailler l’équilibre, allonger le psoas et renforcer les muscles du bas du dos.
LA DEMI-LUNE, POSTURE YIN & YANG
Comme mentionné plus haut, la référence à la demi-lune est une image poétique inspirée par la silhouette que prend le corps du yogi dans la posture.
Le nom de l’asana est également métaphorique puisqu’il suggère un état d’équilibre entre la part d’ombre et de lumière qui la constitue.
La Lune apparaît sous une forme de croissant à nos yeux dans la mesure où l’astre n’est qu’à moitié éclairé par les rayons du soleil. Une part de chaleur et une part de froid, de dynamique et de statique, de féminin et de masculin, de yin et de yang, cohabitent donc et se complètent, dans la posture comme dans l’individu.