De plus en plus reconnu et demandé, l’accouchement physiologique est très en vogue en ce moment. Mais comme pour tout, ce qui est à la mode à tendance à être dénaturé et à perdre ses vertus originelles.
Revenir à l’origine de la physiologie
Beaucoup on tendance à assimiler « physiologique » avec ce qui parait provenir de la nature. Mais il est important de ne pas confondre SA nature avec LA nature. Notre corps est notre. Tout ce qui vient de l’extérieur ne fait pas partie de notre entité. Aussi il n’y a pas d’artifice à apporter quand on parle de physiologique.
Comme l’écrit le dictionnaire Larousse, physiologique veut dire ce qui à trait aux fonctions et aux réactions normales de l’organisme. Un accouchement physiologique est donc un accouchement qui respectent les différentes étapes et processus normaux du corps de la femme qui accouche.
Les différentes étapes de la grossesse et de l’accouchement
Pendant toute la grossesse la physiologie dirige le corps de la future maman afin qu’elle puisse conserver en elle un embryon puis un fœtus en s’organisant autour de lui pour le protéger pendant 9 mois.
Pour faire ce nid il faudra ainsi créer de la place. Or on ne peut pas créer de la place en arrière puisqu’il y a la colonne vertébrale. La place sera restreinte en haut par la cage thoracique. Mais celle-ci étant pneumatique, peut s’élargir et se remonter. Le bébé peut se loger bien bas, mais il finira par prendre trop de place pour se loger sous la symphyse pubienne. Aussi l’essentiel de la place faite sera vers l’avant avec l’écartement des abdominaux via la ligne blanche, une ligne de fascia qui s’écarte de manière physiologique sous l’effet des hormones de grossesse. Et qui se ressert normalement après l’accouchement et avec la chute des taux hormonaux ( à l’inverse de la physiologie il y a la pathologie. Lorsque la ligne blanche ne se ressert pas alors il y a une pathologie : le diastasis. Une rééducation chez un kinésithérapeute est alors nécessaire pour réparer le corps et le ramener dans sa physiologie. ).
Bébé devant rester au chaud, il est physiologique de lutter pour lui contre la gravité. Ce problème ne se pose quasiment que chez les humains à cause de notre bipédie. En effet chez les autres mammifères à quatre pattes, le périnée est verticale et non horizontale. Le ventre est en bas, et il est contenu par des abdominaux très forts. Les petits mammifères sont donc protégés de la gravité puisque la porte de sortie n’est pas en bas.
Mais chez nous le problème se pose. La gravité pousse le fœtus vers le bas, vers la sortie. Le seul rempart pour lui éviter la chute est donc le périnée. Ce périnée qui doit être solide, et qui est prévu pour garantir la fermeture de l’utérus pendant toute la grossesse.
Le jour J, sous stimulation hormonale, sous l’action de bébé qui veut se dégager et créé des pressions sur ce muscle, ce muscle se contracte puis se relâche par saccade. Au fur et à mesure de ce travail de contraction/ relâchement, il s’amollit, il s’ouvre, il se laisse détendre entièrement, laissant toute la place pour que l’accouchement se fasse sans embuche. Bébé aidé par beaucoup de secrétions, de liquides, de pressions dans l’axe fini par trouver la voie et venir au monde.
Malheureusement tout ne se passe pas toujours comme ça. Et malheureusement les « modes » physiologiques ne sont pas toujours du meilleur goût, pouvant au mieux être juste inutile, au pire être réellement néfastes.
Nous allons décortiquer quatre de ces modes pour que les choix soient fait en toute conscience.
Epi-No, la torture et l’incohérence
Beaucoup de femmes, et c’est bien normal, ont peur de l’épisiotomie, cette incision pratiquée ( beaucoup trop nous sommes d’accord ) pour prévenir les déchirures du périnée. Même si il faut remettre en question les chiffres d’épisiotomie et leur raison, afin de les réduire au strict minimum, il faut comprendre les raisons et les pourquoi. Certes il existe des médecins et des sages-femmes mauvais, indélicats, pressés, ou tout simplement complètement débordés qui pratiquent des épisiotomies pour gagner du temps ( comme en perçant des poches des eaux ). C’est une réalité. Pour autant l’épisiotomie est nécessaire dans certains cas. Quand bébé n’est pas dans l’axe du bassin, quand la poussée n’arrive plus à être efficace, que l’accouchement est trop long, maman et bébé sont en danger. Dans ces cas là il ne faut pas hésiter, il faut pratiquer une épisiotomie. Sans aucun danger, la blessure est aussitôt refermée. Certes il peut y avoir des tensions, des tiraillements, des petites infections, mais il n’y a pas eue de catastrophes.
Mais surfant sur cette vague de l’anti- épisiotomie à tout prix, des entrepreneurs ont lancé sur le marché avec le nom tapageur de Epi-No, un matériel aussi absurde qu’extrêmement néfaste.
Absurde car aucun matériel au monde ne peut prévoir à coup sur ce qu’il va se passer le Jour J. Aucun accouchement ne peut être destiné. La seule manière de réduire de manière quasi totale le « risque » d’épisiotomie, c’est….. la physiologie! Si la maman à une bonne position, si elle a encore des sensations qui lui permettent de savoir vraiment où et quand pousser, si elle maitrise sa respiration, si elle ressent son périnée, alors pourquoi le corps se déchirerait? Il n’y a aucune raison pour qu’un corps se déchire quand la physiologie est respectée. Donc l’absurdité de ce matériel est incroyable, et mensonger qui plus est. Car si la poussée n’est pas dans l’axe ou si c’est trop long, il y aura épisiotomie. Et si Papa est un Viking, contrairement à Maman, ou si il y a eu un diabète gestationnelle, alors il pourra y avoir des éraillures sur le vagin au moment de la délivrance. C’est la vie. C’est physiologique.
D’autre part ce matériel consiste à faire croire aux futures mamans qu’il est une bonne idée de dilater son périnée des mois avant un accouchement….???!!! Le seul rempart contre la gravité. Ce qui maintient bébé dans votre ventre. Ce qui maintient le col de l’utérus fermé. Et on devrait l’ouvrir à des mois de l’accouchement? Vraiment? Le risque est réel de finir alitée pour menace d’accouchement précoce.
De plus le périnée étant un muscle, il se recontracte sous l’étirement. C’est le réflexe myotatique. Lorsque vous aurez fini votre séance de stretching forcé de votre périnée, la gravité remettra de la pression dessus, et physiologiquement il se resserrera!
En plus du risque d’être alité, vous risquez de ne plus avoir un périnée qui sait répondre correctement quand on a besoin de lui. Donc pendant un accouchement par exemple. Dommage non? Vous risquez alors de ne pas pousser correctement. Les sages femmes devront peut être alors pratiquer une épisiotomie….Par la suite, vous vous retrouverez avec un périnée qui ne répond toujours pas aux commandes. Pesanteur pelvienne, douleurs pelviennes et lombaires, incontinence urinaire, aux gazs et/ou fécales.
Merveilleux non?
Vouloir éviter la pathologie ne doit pas conduire à en créer une!
Aussi si vous souhaitez réduire vos chances d’épisiotomie, comprenez comment votre corps fonctionne. Traitez le avec amour et parlez en à vos praticiens pour qu’ils éclairent vos lanternes. Ne faites jamais confiance aveuglement à la publicité.
Le massage du périnée
Dans la même veine que Epi-No, mais quasiment sans danger, le massage du périnée pendant la grossesse, démontre que beaucoup de femmes ne connaissent pas leur corps, ni le déroulement d’une grossesse.
Comme nous l’avons vu précédemment le périnée DOIT rester solide pendant la grossesse. Il ne doit être détendu que PENDANT l’accouchement. La nature à prévu tout un tas d’hormones pour l’aider dans ce but. La gravité aura elle aussi son rôle à jouer à ce moment là. Mais on n’étire pas soi-même un périnée. Et le simple fait de croire que c’est possible montre des lacunes dans la connaissance de soi et du corps humain en général. Un muscle met des années pour être vraiment assoupli. Tous les gymnastes vous le diront. Il est illusoire de penser que de vagues massages effectués par soi-même quelques minutes par ci par là peuvent stretcher un muscle aussi puissant que le périnée. Surtout quand on ne sait pas rééllement le situer.
Se toucher, se connaitre intimement est une bonne idée. Et disons le franchement la masturbation est une excellente idée! Surtout pendant une grossesse grâce aux hormones secrétées pendant l’orgasme, qui sont bénéfiques pour tout pleins de raisons. Mais, non on ne dilate pas son périnée. Jamais. Ni avant, ni après un accouchement.
Seule la sage femme le jour J peut pratiquer, elle, un massage profond des fibres postérieures du périnée pendant le travail, pour détendre réellement les fibres pour faciliter le passage de bébé.
Apprenez à vous connaitre, et à vous faire du bien. Pas à déformer votre corps par peur de ce qui peut lui arriver.
Inspirez, poussez, bloquez! Déchirez.
Beaucoup de femmes et malheureusement encore beaucoup de sage-femmes, poussent et font pousser sur un blocage de la respiration. Car en effet ça à été la méthode académique pendant très longtemps, en considérant que lorsque l’on bloque on met plus de pressions et donc la poussée est plus efficace. L’accouchement serait donc plus rapide en poussant sur un blocage.
Certes. Mais en fait…. Non!
Lorsque l’on pousse en bloquant la respiration, il y a une pression énorme qui se place dans l’abdomen et descend sur le périnée. Or si l’on met une grosse pression sur un muscle, il se contracte! Comme nous l’avons vu tout à l’heure c’est le réflexe myotatique. Donc si on pousse sur un blocage le périnée aura tendance à se contracter. Le travail se fera en force. Et comme on peut le deviner aisément il y aura plus facilement des déchirures et/ou des épisiotomies.
Mais si l’on revient à la physiologie pour pousser vers le bas en faisant sortir un contenu sans son contenant il faut tout au contraire pousser en soufflant.
Comme les pratiquants d’arts martiaux ou de tennis qui soufflent, voire crient en faisant un effort. Eux savent pourquoi ils le font. Ils crient ou soufflent pour protéger leur dos. Leur diaphragme remonte pendant qu’ils soufflent, et leurs lombaires sont protégées.
Pendant un accouchement ou lorsque l’on va aux toilettes, on a besoin que le périnée s’ouvre pour laisser passer un contenu ( urines, selles, bébé ) sans le contenant ( vessie, rectum, utérus ). Le diaphragme et le périnée sont des muscles synergiques. Ils fonctionnent ensemble. Si l’un se détend, l’autre aussi. Donc si l’on pousse en soufflant, le périnée s’ouvrira.
Aussi pendant les accouchements physiologiques, ou avec une péridurale qui vous laisse des sensations, il est important de souffler pendant les poussées, en imaginant que vous souffler dans un ballon de baudruche ou dans une paille. C’est d’ailleurs un des seuls accessoires que vous pourriez utiliser pour un bon accouchement ( avec les ballons, les sangles et les coussins de positionnement ).
Encore une fois demandez des explications à vos soignants, ils sont là pour vous renseignez. De nombreux ouvrages expliquent tout de manière vulgarisée ( « Bien être et Maternité » de Bernadette de Gasquet devrait être une lecture obligatoire pour tout futur parent ).
La naissance à l’huile de Pépins de Raisins
Comme écrit plus haut, à l’intérieur du corps de maman il y a énormément de liquide et de sécrétions. Bébé est entouré de liquide amniotique. Il n’y a donc aucun besoin de rajouter un ingrédient miracle pour faire descendre bébé. C’est la gravité et une poussée dans l’axe qui fait le travail.
De plus en plus de blogs, d’articles et même de sage-femmes conseillent de venir à la maternité avec sa propre bouteille d’huile de pépins de raisins, en vous assurant que la délivrance se fera mieux avec…..
Les principales propriétés de l’huile de pépins de raisons sont : inodore, incolore, très bon marché ( environ 3€ le litre ). C’est l’huile de référence lorsque l’on a juste besoin d’un corps gras mais sans plus, et que l’on ne veut pas de tâche ni d’odeur qui pourrait couvrir ou gâcher un parfum, et que l’on veut faire des économies….
Si l’on voulait une huile qui assurerait un toboggan à bébé, l’huile de choix serait l’huile de Ricin. La plus visqueuse des huiles. Qui aurait le don de transformer la salle d’accouchement en patinoire très rapidement et ne laisserait plus aucune accroche aux mains de la sage-femme au moment d’attraper bébé. Pas terrible….
Si l’on voulait une huile qui pénètre vraiment dans les tissus pour les ramollir, il faudrait de l’huile de Macadamia ou équivalent. Sauf que pour ramollir des tissus il faut un massage long et en profondeur. Donc il faudrait tartiner le vagin d’huile à distance de la délivrance. Personne ne le ferait. Et ce ne serait toujours pas physiologique. Et ces huiles ont des odeurs fortes. Et risquerait aussi de causer des problèmes de dérapages ( l’huile de pépins de raisins est beaucoup plus légère, c’est pour ça qu’elle est moins nourrissante ).
Si l’on voulait une huile cicatrisante et anti-inflammatoire pour réparer a postériori le périnée de la maman tout en apportant une qualité « glissante », alors il faudrait opter pour l’huile de Callophyle Inophile. Mais l’odeur est puissante et pas forcément agréable, et la teinte verte ne donne pas envie pour accueillir bébé au monde.
Et c’est le dernier point : l’accueil de bébé au monde. Quant il nait, bébé est entièrement recouvert de son vermix. Un corps gras et blanc qui le recouvre entièrement. Ce vermix sera conservé aussi longtemps que possible pour protéger la peau fragile du nouveau-né. La physiologie à tout prévu. Cette enveloppe le protège, l’hydrate et maintient un peu de chaleur.
Pourquoi alors le recouvrir d’huile? Pourquoi casser la physiologie en le badigeonnant à la sortie? Est-ce vraiment ce qui est bon pour lui? Est-ce vraiment ce que l’on souhaite lui offrir? Un bain d’huile neutre pour son arrivée sur Terre.
Mieux vaut attendre son premier bain pour lui offrir son premier massage à l’huile. Qui lui offrira douceur, amour, bienveillance, et détente, plutôt que de l’embêter dans sa nature à lui.
Voilà pour les fausses bonnes idées sur l’accouchement physiologique.
Comme vous l’aurez compris les dangers ne sont pas de la même importance. Si votre enfant est né dans l’huile, c’est mieux que de naitre dans le froid. Si vous avez tentez de connaitre votre périnée en profondeur, surement vous aurez rencontré votre point G au passage ( il n’y a pas réellement de « point G », mais les cornes de votre clitoris qui passent de part et d’autre de votre vagin et qui en gonflant peuvent faire une protubérance située à environ 2 phalanges à l’avant de votre vagin 🙂 ) et ça c’est toujours sympa.
Pour le reste, l’épisiotomie est très rarement un drame, il vaut mieux une épisio qu’une déchirure complète du périnée. Et même si ça devait arriver, il y aura tout un tas de soignants et de thérapeutes pour vous réparer corps et esprit, et votre bébé sera lui bien là.
Dans tous les cas n’hésitez pas à demander conseil.
Bonne grossesse et bon accouchement!